
Dans le cadre de notre focus santé, le Salon des Seniors a rencontré Jean-François Thébaut, diabétique depuis 20 ans et vice-président de la Fédération Française des Diabétiques, afin de l’interroger sur cette maladie mal connue qui touche plus de 5% de la population française : le diabète.
« Tous les français ont entendu parler du diabète mais peu savent exactement ce que c’est. »
Expliquez-nous ce qu’est le diabète ? Existe-t-il différentes formes ?
Le diabète est une anomalie de fonctionnement au niveau du métabolisme du sucre. C’est-à-dire un déficit ou une mauvaise utilisation du fonctionnement de l’insuline. L’insuline c’est l’hormone qui permet aux cellules d’incorporer le glucose, qui est le carburant de toutes les cellules de l’organisme.
Avoir trop de glucose dans le sang crée des complications, des atteintes notamment des protéines qui vont in fine abimer les vaisseaux et des micros-vaisseaux et ainsi créer une multitude de complications partout là où il y a des vaisseaux. Etant donné qu’il y a des vaisseaux partout dans l’organisme, tous les organes peuvent donc être touchés, tant au niveau du cœur, du cerveau, des reins que des artères…
Il y a plusieurs formes de diabète, dont deux principaux qui sont radicalement différents.
- Le diabète de type 1 est une maladie immunologique engendrant une mauvaise reconnaissance de l’insuline. Cette dernière est normalement fabriquée par le patient mais n’est pas utilisée par son organisme. Ce type de diabète apparait uniquement chez les personnes jeunes, parfois même chez les très jeunes enfants.
Le traitement est exclusivement lié une injection d’insuline puisque c’est de là que vient le problème, l’insuline du patient n’étant pas utilisée par son organisme. Ces diabétiques représentent 6% à 7% de l’ensemble des diabétiques en France.
Sans que l’on n’en connaisse réellement la raison, le nombre de cas est en net augmentation avec une évolution de près de 4% par an. Des facteurs épigénétiques tels que les perturbateurs endocriniens sont évoqués comme causes à cette augmentation rapide. En effet, le diabète de type 1 n’est pas héréditaire au sens où l’on n’a pas identifié de facteur de transmission, mais il est souvent familial. On ne sait pas si ce sont des déterminants de santé globaux ; des conditions de vie ou d’alimentation par exemple ou si c’est un facteur génétique comme beaucoup de maladies qui sont à consonance familiale mais il est certain qu’il ne s’agit pas d’une transmission héréditaire. C’est par un autre mécanisme qui en l’occurrence peut être épigénétique que le diabète de type 1 est contracté.
- Le diabète de type 2 est un diabète qui atteint des personnes plus âgées après 50 ans (moyenne d’âge 70 ans). C’est un diabète qui s’est installé très insidieusement et très progressivement contrairement au diabète de type 1 qui lui a une révélation souvent brutale par des accidents tels que des comas chez des enfants ou des jeunes adultes. Chez le diabétique de type 2 au contraire c’est extrêmement lent, sournois et ça ne peut être révélé que par un dosage de la glycémie dans le sang.
Le diabète de type 2 peut se prévenir.
A côté de cela, il y a d’autres types de diabètes. Soit les diabètes dits de type rare comme le diabète de type 3.
Soit des diabètes secondaires qui sont dus à d’autres maladies ou à un traitement. Le traitement de la mucoviscidose par exemple favorise l’apparition du diabète car il atteint les cellules du pancréas, d’autres traitements comme les corticoïdes au long court donnent également du diabète. Et puis il y a le diabète de la femme enceinte que l’on appelle le diabète gestationnel qui lui peut être soit révélateur d’un diabète futur soit simplement le signe d’un conflit hormonal et immunologique entre la mère et l’enfant. Ce type de Ce diabète gestationnel disparait après la naissance.

Est-il possible de guérir ?
Le diabète de type 1 ne se guérit pas, sauf par la greffe des cellules du pancréas. Les greffés sont donc pour la plupart guéris du diabète mais devront suivre à vie un traitement lourd antirejet.
A part cela ça ne se guérit pas mais ça se soigne et ça se traite très bien.
Pratiquement 20% des diabétiques ne sont pas diagnostiqués, pourquoi ? Quels sont les symptômes du diabète ?
Il y a 3 3600 000 personnes diagnostiquées en France et ont estimes que 400 000 ne sont pas diagnostiquées. Comme précisé précédemment les diabétiques de type 1 sont toujours diagnostiqués car la découverte coïncide avec la survenue d’un épisode aigu.
Pour les diabétiques de type 2 cela se traduit par une augmentation progressive de la glycémie et il n’y a pratiquement pas de symptômes. Le signe indicateur le plus probant est la surcharge pondérale.
Le diabète de type 2 ne peut se détecter que par une prise de sang pour mesurer la glycémie. Lorsque la glycémie est supérieure à 1.25 g, on est déclaré diabétique et lorsqu’elle se situe entre 1.10 g et 1.25 g, on est prédiabétique.
Lorsque l’on est déclaré diabétique, il n’a a pas réellement de symptômes, sauf dans les périodes où le diabète est très déstabilisé et dans ce cas ce sont les symptômes de l’hyperglycémie qui apparaissent : l’asthénie (fatigue extrême), le fait d’avoir soif tout le temps et de beaucoup uriner.
30% du temps, le diabète est découvert à l’occasion d’une complication, infarctus, AVC, grippe…
L’objectif de la semaine de prévention de la FFD est d’inciter les gens qui ne se savent pas diabétiques à faire une prise de sang pour chercher le diabète.
En 2021, le thème de la semaine de prévention sera « diabète et hypertension artérielle » pour sensibiliser au risque croisé représenté par ces deux pathologies. Un site dédié à cette campagne est disponible à l’adresse : https://contrelediabete.federationdesdiabetiques.org

Quels sont vos conseils pour maintenir une vie saine et tenter d’éloigner le diabète ?
Il est tout à fait possible de prévenir la survenue d’un diabète par des mesures simples : faire de l’exercice physique de façon régulière et changer d’alimentation. L’exercice physique étant un élément absolument fondamental.
En cas de diabète léger ou de prédiabète, au tout début, il est tout à fait possible de faire en sorte qu’il n’apparaisse pas et cela sans traitement, seulement en modifiant ses habitudes de vie. Après un certain stade, on pourra équilibrer le diabète le mieux possible mais la prise de traitement sera obligatoire toute la vie.
Ne vous méprenez pas, lorsque que l’on parle d’activité physique régulière, on ne vous demande pas de courir un marathon, ça peut être de la marche à pied pour promener son chien, faire les courses, descendre une station de métro avant, faire de la gym douce, du vélo… L’activité physique n’a pas besoin d’être intensive, ni même violente, mais elle doit absolument être régulière, à raison de 30 minutes 5 fois par semaine. La sédentarité est l’ennemi mortel de la bonne santé !
L’activité sportive peut être fragmentée, par exemple 10 minutes systématiques de marche à pied après la fin des repas et aussi efficace que 30 minutes consécutives de marche par jour.
Eviter la sédentarité et faire une activité physique régulière est primordiale car bien entendu cela permet de lutter contre la surcharge pondérale et cela prévient également une foule de maladies (pas seulement le diabète), telles que l’hypertension, les maladies cardio-vasculaires, les accidents cérébraux, les maladies neuro-dégénératives et même le cancer. Lors de nos campagnes de prévention et d’information pour inciter à une vie plus saine on ne lutte pas exclusivement contre le diabète, c’est pour cela que l’on organise nos campagnes avec d’autres associations. En 2020 par exemple nous nous sommes associés à la Fondation pour la Recherche pour l’Hypertension Artérielle car nos objectifs sont communs, même si on ne lutte pas contre les mêmes maladies, les populations sont très proches et les mesures de prévention sont les mêmes.
« L’activité physique doit être régulière – 30 minutes 5 fois par semaine »
On a tendance à penser que pour maintenir une vie saine, il faut par exemple, ne plus manger de sucre. Est-ce possible, est-ce efficace ?
Il est impossible de ne plus manger de sucre car il y en a partout, sous différentes formes.
On qualifie les sucres en fonction de leur rapidité d’absorption, caricaturalement on parle des sucres rapides et des sucres lents.
- Les sucres rapides, C’est familièrement ce que l’on appelle Le sucre, qui est une molécule qui associe du glucose et du fructose. C’est celui que l’on trouve dans les fruits mais c’est aussi celui dans les bonbons, etc. Il faut éviter Le sucre mais pas les sucres.
Quand vous mangez des pommes de terre par exemple, elles contiennent du sucre sous forme d’amidon, idem pour le pain complet. Il faut privilégier les sucres d’absorption lente, ce que l’on appelle faussement les sucres lents.
- Les sucres à index glycémique bas sont meilleurs car ils sont plus lentement absorbés. Ils restent attachés aux fibres de l’alimentation que nous avons dans l’estomac et vont être relâchés progressivement au fur-et-à-mesure du transit intestinal. Alors que les sucres rapides (Le sucre) sont absorbés dès qu’ils arrivent dans l’estomac, cela donne un pic de glycémie extrêmement rapide après l’absorption. Si au contraire, vous avez mangé beaucoup de fibres, des légumes verts par exemple, qui, ne vous méprenez pas contiennent aussi des sucres et bien l’absorption va être beaucoup plus lente. Il n’y aura donc pas ce pic de glycémie, cette dernière sera donc mieux régulée par votre organisme.
Le sucre est partout, on ne peut pas vivre sans sucre. Les régimes où l’on essaye de supprimer totalement les sucres sont extrêmement toxiques. Ce type de régime met l’organisme en acidocétose ce qu’il l’oblige à fabriquer du sucre à partir d’autres substances. Il faut une alimentation équilibrée avec 5 fruits et légumes par jour. Néanmoins, attention à ne pas abuser de certains fruits tels que cerises ou les raisins pour ne citer qu’eux car ils sont très sucrés.
Une fois le diagnostic posé quelle est la marche à suivre ? Quels sont généralement les aliments interdits ? Un diabétique peut-il vivre normalement ?
Une fois le diagnostic de diabète de type 2 posé, la première chose à faire est un bilan complet avec son médecin afin de rechercher des risques associés et notamment ceux cardiovasculaires. La deuxième chose à faire est de chercher s’il y a déjà des complications du diabète :
- Les yeux : fond d’œil – Le diabète est la première cause de cécité en France
- Les reins : la première cause de dialyse en France est l’insuffisance rénale due au diabète
- Le cœur : infarctus – 30% victimes d’infarctus ont un diabète
- Le cerveau et les nerfs – l’atteinte des micros-vaisseaux engendre des polynévrites.
- Les pieds – Le pied diabétique est également l’une des complications très graves du diabète. C’est le fait d’avoir des plaies au niveau de la plante des pieds et de ne pas les sentir. Ces petites plaies peuvent être à l’origine de plaies énormes et conduire à l’amputation. Oui, l’amputation, il y a 9 000 amputations uniquement à cause de cela.
Le bilan doit être complet et suivant le grade du diabète il y aura des examens réguliers à faire : le fond d’œil, la prise de sang, l’analyse d’urine, l’électrocardiogramme.
Les complications microvasculaires du diabète touchent aussi les diabétiques de type 1.
Quant à elles, les complications macrovasculaires, quand les gros vaisseaux sont atteints, engendrent des infarctus, des AVC, ou de l’artérite des membres inférieurs (artères des jambes qui se bouchent).
« … Les diabétiques n’ont pas plus de risque d’attraper la Covid que n’importe quelle autre personne mais lorsqu’ils l’attrapent, le diabète est un facteur aggravant. »
Covid : Etude coronado
Concernant le fait d’avoir une vie normale, il faut nuancer. Les diabétiques de type 1 ont des astreintes inévitables qui sont d’avoir des piqûres d’insuline plusieurs fois par jour. A cette réserve près qu’ils doivent contrôler et adapter les doses d’insuline, le diabétique de type 1 peut avoir une vie normale.
Enormément d’innovations technologiques sont en cours et impliquent les nouvelles technologies comme, les applications mobiles et l’IA d’une part et d’autre part et les médicaments. Ces innovations améliorent nettement la qualité de la prise en charge des patients et donc leur qualité de vie.

Expliquez-nous les missions de la FFD
La Fédération Française des Diabétiques existe depuis plus de 80 ans. Elle a été créée pour accompagner la mise sur le marché de l’insuline. D’ailleurs, l’année 2021 marque le centenaire de la découverte du traitement par l’insuline.
La Fédération Française des Diabétiques regroupe des associations luttant toutes contre le diabète et pour les patients diabétiques. Un total de 100 associations et délégations affiliées réparties au niveau territorial sur tous les départements.
Les missions de la FFD sont multiples :
- Accompagnement
Accompagner les patients diabétiques qu’ils soient adhérents ou pas. La FFD est ouverte à tous les diabétiques ou toute personne vivant avec un diabétique ou souhaitant s’informer. Nous comptons environ 1 500 bénévoles actifs permanents, 13 000 adhérents et 22 000 donateurs.
- Formation
Dans le cadre de notre mission d’accompagnement, nous avons mis en place un programme qui s’appelle Elan solidaire. Ce programme permet de former des patients experts, c’est-à-dire proposer l’accompagnement de patients par des pairs. La fédération est la 1ère association à avoir créé la notion de patient expert. Les malades et les patients experts ont la même maladie mais ces derniers ont reçu une formation spécifique pour aider les patients qui en ont besoin. Que ce soit dans le cadre d’un accompagnement individuel ou collectif, au sein d’un programme d’éducation thérapeutique ou du projet Elan solidaire, Il s’agit donc d’un travail d’écoute et de partage qui vise à favoriser la mobilisation des ressources de la personne dans le respect de son projet de vie… La Fédération compte environ 250 bénévoles Patients Experts qui accompagnent 1 000 personnes par an soit plus de 9 000 personnes accompagnées depuis le lancement du programme en 2008 grâce au soutien financier de l’Assurance Maladie.
- La prévention
La Fédération Française des Diabétiques de France organise chaque année depuis 2012 en juin la Semaine Nationale de prévention, une action primordiale permettant de sensibiliser, informer le grand public sur l’ensemble du territoire pour prévenir le diabète de type 2 et les facteurs de risques associés. De nombreuses actions sont ainsi organisées par les associations fédérées partout en France.
- L’assistance
A côté de cela, nous avons également un rôle d’assistance pour répondre aux questions (techniques, scientifiques, sociales et psychologiques). Nous avons 4 lignes d’écoute dont une ligne générale où les gens posent tous types de questions. Avant la COVID, nous avions 2 000 accompagnements téléphoniques par an, dont 20% qui ne concernaient que des problèmes sociaux au travail.
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